QO 17/01/23 à la Ministre Morreale : l’opinion semestrielle de l’Union wallonne des entreprises (UWE) à propos de l’emploi au sein de l’économie wallonne
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Question (Nicolas Janssen). – Madame la Ministre, l’Union wallonne des entreprises a publié en fin d’année son opinion semestrielle sur les évolutions conjoncturelles de l’économie wallonne. En ce qui concerne l’emploi, il en ressort que bien que l’emploi privé devrait rester stable au cours des six prochains mois selon les projections, le manque de main-d’œuvre reste un enjeu majeur pour la Région et l’un des facteurs influençant le plus la compétitivité des entreprises. Ce serait dû principalement à une inéquation des compétences des demandeurs d’emploi wallons par rapport aux besoins des entreprises ainsi qu’à une activation insuffisante. Quelle est votre position par rapport à ce constat, et plus spécifiquement sur les causes de l’inéquation des compétences des demandeurs d’emploi par rapport aux besoins des entreprises ? Pour l’Union wallonne des entreprises, il faut une meilleure orientation au niveau de l’enseignement et le FOREm doit aussi former plus de personnes qu’actuellement. Qu’en pensez-vous ? Comment augmenter durablement le taux d’emploi ? Pourriez-vous faire le point sur ce que vous entreprenez pour combler l’inéquation des demandeurs d’emploi par rapport aux besoins des entreprises et éviter un tassement des perspectives d’embauche ? Une réforme des aides à l’emploi et à la formation est en préparation par votre cabinet et l’administration. Celle-ci tient compte de ces constats. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Réponse de Mme Morreale, Ministre de l’Emploi, de la Formation, de la Santé, de l’Action sociale et de l’Economie sociale, de l’Egalité des chances et des Droits des femmes. – Monsieur le Député, les tensions rencontrées lors d’un recrutement ne résultent évidemment pas uniquement d’une inadéquation des compétences des demandeurs d’emploi par rapport aux besoins des entreprises, ni même d’une activation qui serait forcément insuffisante. Les causes des pénuries ou tensions pour certains métiers sont multifactorielles. On vient d’en parler sur la question de l’aide et du soin. Elles peuvent bien évidemment résulter d’une inadéquation entre les compétences recherchées et les profils des candidats, mais elles peuvent aussi être la conséquence d’une surévaluation du profil recherché par rapport aux besoins effectifs. Ce n’est peut-être pas une question sans fin, mais à tout le moins particulièrement complexe. Les exigences en matière d’expérience professionnelle constituent, dans certains cas, un frein à l’insertion de demandeurs d’emploi disposant pourtant des compétences nécessaires à l’exercice de métiers en demande. Les causes de tensions sont également liées au manque d’attractivité de certaines professions qui peut provenir d’un manque de visibilité ou d’une vision erronée du métier ou résulter des conditions de travail et notamment des conditions de rémunérations ou de la pénibilité pour certaines fonctions. C’est sur l’ensemble de ces facteurs qu’il convient de travailler afin d’apporter une réponse aux besoins du marché de l’emploi wallon, avec cette spécificité que nous avons en Wallonie des demandeurs d’emploi qui, pour moitié, ont au moins deux ans d’inactivité – ce qui rend les choses compliquées à la réactivation puisque cela nécessite toutes les mesures que nous avons prises, notamment les Territoires zéro chômeur longue durée, ou encore sur les Coups de boost pour lesquels la Wallonie a souhaité mettre des moyens supplémentaires via le Plan de relance pour remettre sur les rails des personnes très éloignées –, mais également des adultes qui arrivent sur le marché de l’emploi avec un taux de formation extrêmement faible. Notre volonté et le travail réalisé permettent de mettre plus de gens dans des formations principalement en demande ou en tension, en sachant que nous avons un gap à la base. Si je regarde la situation au Danemark, les gens sont très qualifiés ; c’est beaucoup plus facile de les remettre à l’emploi. Cela prend plus de temps pour nous de faire ce travail. C’est d’ailleurs ce qui se retrouve dans le nouveau contrat de gestion voté à l’unanimité au niveau du FOREm. Beaucoup de solutions différentes sont déployées, on agit avec plusieurs leviers différents pour améliorer ce taux d’emploi qui, sous cette législature, est passé de 63,7 % à 65,2 % malgré les crises que l’on a connues. On savait que l’on partait de très bas, on a continué à augmenter, et nous avons un taux de chômage qui a diminué en un an de 5,4 %. On sait que malgré les difficultés conjoncturelles auxquelles on est confrontés, on doit mettre les bouchées doubles pour améliorer cette situation. On a renforcé l’orientation tout au long de la vie, avec notamment des dispositifs des cités des métiers, on a renforcé des incitants vers les formations, avec mon collègue Willy Borsus, notamment celles qui mènent vers des métiers en pénurie ou à des fonctions critiques, avec des primes métiers en pénurie. Plus récemment, on a doublé, à partir du 1er janvier, l’euro de l’heure de formation pour éviter que des gens se rendent moins en formation que précédemment. C’était une demande importante. De nombreuses actions de promotion des métiers en pénurie et en tension auprès des demandeurs d’emploi, des jeunes et des étudiants sont également menées par le Service public de l’emploi. On peut aussi citer la mise en production, depuis septembre 2022, de nouveaux outils digitaux, notamment en matière de communication des opportunités d’emploi et de mise en visibilité de profils de candidats disponibles. Vous me parliez tout à l’heure d’employeurs qui surévaluaient le profil dont ils avaient besoin. Le FOREm m’expliquait encore hier, à travers le contact que j’ai eu avec son administratrice générale, qu’ils allaient bientôt pouvoir lancer un dispositif permettant aux employeurs, quand ils lancent une offre d’emploi, d’avoir non seulement les candidats qui correspondent exactement au profil qu’ils ont défini, mais aussi tous ceux qui sont proches du profil qu’ils recherchent, afin d’élargir leurs opportunités d’emploi. La réforme de l’accompagnement qui a été adoptée par le Parlement est en cours d’implémentation au sein du FOREm. Il va aussi contribuer à renforcer l’adéquation entre l’offre et la demande d’emploi en Wallonie. C’est une réforme très importante qui vise à déployer de nouvelles modalités d’accompagnement adaptées à la situation de chaque individu et du marché de l’emploi, ainsi qu’à notre environnement socio-économique. Outre les importants travaux en cours en matière de formation en alternance, on avance aussi pour renforcer la formation en milieu de travail pour répondre davantage aux besoins des entreprises et des stagiaires. Sur la formation en alternance, un projet de décret a été adopté en première lecture par le Gouvernement à la fin de l’année passée, et la réforme du dispositif PFI passera en première lecture au Gouvernement la semaine prochaine. S’agissant de votre très vaste question sur l’intégralité du bilan pour essayer de remédier à la pénurie et d’augmenter le taux d’emploi, ce qui est au cœur de notre Déclaration de politique régionale, je peux vous confirmer que l’on continue à travailler avec le groupe des partenaires sociaux pour revoir les dispositifs d’aide à la formation des travailleurs, pour les recentrer vers les objectifs initiaux et favoriser le renforcement des compétences porteuses pour le marché de l’emploi de la Région wallonne et son développement.
Réplique de N. Janssen. – Madame la Ministre, je vous remercie d’avoir répondu à cette très vaste question en rappelant un certain nombre de causes multifactorielles de la situation que l’on connaît et de cette complexité, et en ayant développé la corrélation entre le taux d’emploi et le taux de formation. Je pense qu’il s’agit en effet d’une question assez centrale qui détermine beaucoup de choses liées à notre Région. Je vous remercie d’avoir précisé et rappelé ce que votre Gouvernement est en train de réaliser en la matière.