QO 04/11/24 à la Ministre Dalcq : la COP16 et ses enjeux pour la Wallonie
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Question (Nicolas Janssen). – Madame la Ministre, la COP16 sur la biodiversité marquait une étape importante pour la préservation de la nature à l’échelle mondiale. L’événement faisait suite à l’accord historique de 2022 signé lors de la COP15 à Montréal, qui définissait, pour rappel, 23 objectifs ambitieux à atteindre d’ici 2030, notamment la protection de 30 % des terres et mers et la restauration de 30 % des écosystèmes dégradés. La COP16 représentait dès lors, d’une certaine manière, un premier reality check pour évaluer les stratégies nationales mises en place pour atteindre ces objectifs. La Belgique, bien que n’ayant pas encore finalisé sa stratégie nationale pour la biodiversité, et la Wallonie, en tant que région fortement engagée dans les questions de préservation de la biodiversité, sont bien évidemment directement concernées par ces débats. À l’heure où les pressions sur les écosystèmes régionaux augmentent, il est d’autant plus important d’interroger nos actions locales en matière de conservation et de régénération. Lors de la COP16, les pays ont été amenés à rendre compte des stratégies mises en place pour répondre aux objectifs fixés en 2022. Pouvez-vous nous préciser où en est la Wallonie dans l’élaboration de ses stratégies et cibles pour la préservation de la biodiversité, en lien avec le cadre mondial fixé en 2022 ? Quelles sont les mesures prises pour rendre les écosystèmes de notre Région plus résilients, notamment en matière de protection des zones humides et de régénération forestière ? La Wallonie compte-t-elle renforcer ses mesures de protection, notamment pour des espèces emblématiques comme le grand tétras, les chauves-souris ou certaines espèces végétales en danger ?
Mme Anne-Catherine Dalcq, Ministre de l’Agriculture et de la Ruralité. – La seizième Conférence mondiale sur la biodiversité s’est clôturée le 1er novembre. Les discussions se sont poursuivies jusqu’à la fin pour essayer d’obtenir un accord. Voici déjà quelques informations en attente d’une analyse plus complète des conclusions de la COP16. Malgré un bilan qui pourrait sembler mitigé, la conférence a enregistré de vrais succès pour l’énergie, la coordination et le fort esprit communautaire qu’il a apporté, tant à l’événement qu’à la promotion de la biodiversité. Cependant, malgré l’urgence d’augmenter rapidement les financements pour la nature via les apports des pays développés, la réorientation des subventions nuisibles et des incitations positives, peu de projets ont été réalisés à la COP16, probablement en raison de l’ampleur des fonds nécessaires. Pour préparer cette conférence, la Wallonie a participé activement au processus d’élaboration des positions belges et européennes via le groupe Biodiversité du Comité de coordination de la politique internationale de l’environnement. La délégation belge ne comprenait pas de représentants wallons sur place à cette conférence, puisque leurs positions avaient été transmises en amont, mais ils avaient bien évidemment été informés du déroulement de celle-ci. Il est important de souligner que, dans la lignée de la Stratégie européenne en faveur de la biodiversité et du cadre mondial en matière de biodiversité adopté lors de la COP15, la Wallonie s’est dotée, à son échelle, d’une stratégie pour enrayer le déclin de la biodiversité wallonne dès 2030, restaurer et préserver les écosystèmes à l’horizon 2050 : la stratégie Biodiversité 360°. Cette stratégie fixe des objectifs en matière de nature et de biodiversité dans tous les secteurs pour la décennie 2020-2030. Comme mentionné dans sa Déclaration de politique régionale 2024-2029, le Gouvernement wallon évaluera cette stratégie. Rappelons que cette stratégie fixe notamment un objectif d’augmenter le réseau d’aires protégées et de réaliser des actions de restauration des aires protégées. Plus concrètement, une de ces actions vise à atteindre la protection de 2 % du territoire wallon d’ici 2025 et 5 % d’ici 2030. Par ailleurs, concernant l’objectif des 10 % fixé par la Stratégie européenne en faveur de la biodiversité, ce dernier concerne l’ensemble du territoire européen. Il est ainsi demandé aux pays de participer à l’atteinte de cet objectif. Par rapport au programme Yes We Plant, le plan doit évidemment faire l’objet d’une évaluation. Un accompagnement pour la plantation des haies sera maintenu en lien avec cette évaluation. Plusieurs autres actions seront envisagées pour rendre les écosystèmes wallons plus résilients face aux effets du réchauffement climatique. Premièrement, une étude de l’impact du changement climatique sur certains habitats d’intérêt communautaire en Wallonie, pilotée par l’Agence wallonne pour l’air et le climat, l’AWAC, est en cours de réalisation. Cette étude nous permettra de prendre en compte l’impact du changement climatique dans l’établissement de nouveaux objectifs de conservation futurs pour ces habitats clés en Wallonie. Une seconde étude, ayant pour but d’approfondir cette modélisation de l’impact du changement climatique – cette fois-ci sur tous les habitats d’intérêt communautaire en Wallonie –, sera réalisée dans le cadre du projet LIFE Belgium for Biodiversity, coordonné par le SPW ARNE. Cette étude est envisagée pour 2025. Dans le cadre du projet LIFE Belgium for Biodiversity, une révision des objectifs de conservation pour les espèces d’intérêt communautaire est prévue afin de prendre en compte la situation actualisée de l’état de conservation de la biodiversité sur le territoire wallon. Le DNF travaille également à l’application de la loi de la restauration de la nature, qui marquera elle aussi un tournant dans la protection de la biodiversité. Concernant les oiseaux, Monsieur le Député, vous citez dans votre question le grand tétras, mais cette espèce est éteinte en Région wallonne depuis plus d’un siècle. En revanche, le tétras-lyre fait l’objet d’une protection très stricte, ainsi que d’un ambitieux programme de réintroduction depuis plusieurs années. Toutes les espèces de chauves-souris sont intégralement protégées en Région wallonne. Cette protection interdit notamment la perturbation intentionnelle, la capture, le transport, la détention et la mise à mort d’individus ainsi que la détérioration et la destruction de son habitat. Bon nombre d’espèces végétales sont également protégées dans la loi de la conservation de la nature. Concernant la question de M. Jacob, liée à la Stratégie nationale sur la biodiversité, je peux vous indiquer que le processus d’adoption est en cours à la suite de la consultation publique. La Conférence interministérielle de l’environnement devrait d’ailleurs adopter cette stratégie nationale avant la fin de l’année 2024. Cette Stratégie nationale sur la biodiversité couvre l’ensemble des cibles et des objectifs du Cadre mondial de Kunming-Montréal sur la biodiversité. Comme indiqué, la position de la Belgique concernant la 16ᵉ Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique a été définie par les mécanismes de coordination établis par le groupe Biodiversité du CCPIE – Comité de coordination de la politique internationale de l’environnement. La Wallonie et la Belgique appuient le mécanisme d’évaluation de la mise en œuvre du cadre global pour la biodiversité, mettant ainsi en avant l’importance du cadre de suivi et de ces indicateurs pour assurer une mise en œuvre efficace du GBF du Cadre global pour la biodiversité. Nous favorisons également l’intégration de la biodiversité dans différents secteurs et soulignons l’importance de la coopération à tous niveaux, tant entre les Conventions de Rio qu’au niveau national et local. Nous soutenons le Fonds pour l’environnement mondial. Nous appuyons également le Fonds du cadre mondial établi à la demande de la COP15. Nous soutenons aussi un mécanisme multilatéral de partage des avantages liés à l’utilisation des informations de séquençage numérique, y compris la création d’un fonds. Enfin, nous souhaitons garder la possibilité d’étendre ce mécanisme aux ressources génétiques physiques.
Réplique de N. Janssen. – Merci, Madame la Ministre, d’avoir rappelé l’importance de la stratégie wallonne Biodiversité 360°. Je me permettrai de revenir vers vous quant à la manière dont le Gouvernement évaluera cette stratégie. Je pense qu’on est tous intéressés de savoir comment cette évaluation sera réalisée, notamment sur le volet Yes We Plant. Enfin, je me réjouis que la Stratégie nationale sur la biodiversité soit adoptée avant la fin de l’année.