QO 20/02/24 à la Ministre Tellier : Les conséquences du nouveau cadre de référence en matière d’énergie éolienne sur l’implantation d’éoliennes en forêt
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Question (Nicolas Janssen). – Madame la Ministre, le Gouvernement wallon a validé, ce 8 février, une circulaire offrant un nouveau cadre de référence pour le développement éolien en Wallonie. Celui-ci permet notamment aux développeurs d’installer des éoliennes plus puissantes, pouvant atteindre 180 à 200 mètres de hauteur, alors que la distance d’implantation des mâts par rapport à la zone d’habitat est fixée à un minimum de 500 mètres plus la moitié de la hauteur du mât. Un futur décret sur le permis d’environnement est prévu. Pouvez-vous nous préciser les mesures transitoires prévues concernant l’octroi et le renouvellement des permis d’environnement dans ce nouveau cadre ? Les projets en cours devront-ils être adaptés ? Pourriez-vous présenter le calendrier qui a été arrêté concernant ce projet de décret sur le volet du permis d’environnement ? Bien que les éoliennes soient plus efficientes, les conséquences de mâts plus élevés sur la santé des riverains et sur la biodiversité posent question. Les impacts de ces éoliennes plus puissantes ont-ils fait l’objet d’études scientifiques ? Que répondez-vous aux riverains qui s’en inquiètent ? Par ailleurs, certaines associations environnementales soulignent l’attention qu’il convient d’apporter à l’installation d’énergies renouvelables en forêt, dans des zones à enjeux forts pour la biodiversité, ainsi qu’une attention accrue portée aux paysages. Le nouveau cadre et le futur projet de décret tiennent-ils compte de ces points d’attention ? À cet égard, vous avez dit que les éoliennes en forêt sont interdites par la loi en dehors des bordures de routes. Cependant, de plus en plus d’éoliennes apparaissent en forêt et bon nombre de projets ont été déposés. Or, les bordures des forêts sont des zones riches en biodiversité, on le sait. Quant aux conditions d’octroi d’une dérogation permettant de dépasser les 750 mètres prévus, elles sont très floues et permettent toutes les interprétations. Pourriez-vous clarifier les conditions visant cet aspect précis ? Enfin, que signifie « sauf au bord des routes » ?
Mme Tellier, Ministre de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal. – Monsieur le Député, la circulaire du Gouvernement constituant le nouveau cadre de référence éolien wallon prévoit la mesure transitoire suivante : « Elle s’applique aux demandes de permis déposées trois mois après son adoption, ainsi qu’à celles introduites avant cette échéance, mais à la double condition qu’elles soient portées devant le Gouvernement à la suite d’un arrêt d’annulation du Conseil d’État postérieur à cette échéance de trois mois et qu’elle fasse l’objet d’un dépôt de plan modifié ». En clair, les projets en cours d’instruction ne devront donc pas être adaptés. Sauf – et ce sont des cas très spécifiques – s’il s’agit d’une réinstruction faisant suite à un arrêt d’annulation du Conseil d’État. Par ailleurs, le projet de décret portant la réforme du permis d’environnement avance bien. Celui-ci sera soumis en troisième lecture au Gouvernement wallon dans les prochaines semaines. Concernant l’impact des éoliennes et des mâts plus élevés sur la santé des riverains, les normes contenues dans les conditions sectorielles éoliennes que nous avons fait adopter en 2021 sont bien évidemment toujours d’application. En ce qui concerne les conséquences des mâts plus élevés sur la biodiversité, elles sont en réalité plutôt positives. En effet, l’activité de la faune volante – notamment les chauves-souris – se concentre principalement dans les premières dizaines de mètres au-dessus de la végétation. Dès lors, augmenter la hauteur de l’éolienne et par conséquent du rotor implique que la zone d’air brassé par les pales de l’éolienne sera plus haute et donc moins fréquentée par ces animaux. Les risques de collision s’en retrouveront donc amoindris. De plus, au vu du diamètre toujours plus grand des rotors, une augmentation de la hauteur totale des éoliennes est particulièrement encouragée du point de vue de la biodiversité, afin d’éviter des bas de pale proches de la végétation, qu’elles soient herbacées ou ligneuses. Je rappelle par ailleurs que nous avons pris des dispositions dans le cadre des conditions sectorielles pour imposer l’arrêt du rotor, l’arrêt de l’éolienne en cas d’activité des chiroptères importante à l’approche de ceux-ci. On a également des dispositions sur le plan technique qui sont activées pour protéger cette faune. Il convient d’ailleurs de noter que deux études scientifiques récentes menées en Wallonie dans le cadre d’un marché public de services démontrent une activité plus importante des chauves-souris dans les premières dizaines de mètres au-dessus de la végétation, ce qui souligne encore une fois l’importance de garder une distance minimum de 35 mètres entre la végétation et le bas des pales de l’éolienne. Vu l’augmentation constante de diamètre des rotors, la préservation de cette distance ne peut se faire que par une augmentation de la hauteur totale des éoliennes. Concernant plus particulièrement l’installation d’éoliennes en forêt, celle-ci est soumise à de nombreuses règles. Tout d’abord, le Code de développement territorial prévoit que la zone forestière peut comporter une ou plusieurs éoliennes, à l’exclusion des sites reconnus en vertu de la LCN et des feuillus au sens du Code forestier, pour autant qu’elles soient situées à moins de 750 mètres des principales infrastructures de communication et qu’elles ne mettent pas en cause de manière irréversible la destination de la zone. Le nouveau cadre permet de préciser cette dernière condition en prévoyant que la zone forestière peut contenir des éoliennes dans les zones pauvres en biodiversité et constituée de plantations de résineux à faible valeur biologique. Il incombe à l’étude d’incidences sur l’environnement de démontrer ce faible intérêt biologique. Ces zones ne peuvent généralement pas être assimilées à des zones à enjeux forts pour la biodiversité, au contraire notamment de beaucoup de forêts feuillues. Il est en outre pertinent de noter que si les lisières forestières sont en effet généralement des milieux riches en biodiversité, cela s’applique peu aux lisières de plantations résineuses monospécifiques de faible valeur biologique.
Réplique de N. Janssen. – Merci beaucoup, Madame la Ministre, pour l’ensemble de ces précisions.