QO 25/09/23 au Ministre Henry : La négligence face au manque de bornes de rechargement rapide pour véhicules électriques
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Question (Nicolas Janssen). – Monsieur le Ministre, le manque de bornes de recharge rapide sur le réseau de la SOFICO suscite des préoccupations. Les GRD constatent que certaines aires de type un et deux sont inexploitées, alors que le réseau électrique permettrait l’installation de ce type de bornes. La SOFICO semble peu réactive, malgré des signaux très clairs de la part des acteurs privés qui expriment une demande pour répondre à de tels besoins. Le budget alloué à la SOFICO au développement des bornes rapides sur les réseaux structurants est nul, est de zéro. Cela soulève des préoccupations quant à l’absence d’une stratégie claire et définie pour le déploiement de ces infrastructures essentielles, malgré l’objectif du Plan de relance d’installer un total de 1 000 points de recharge sur ce réseau. La SOFICO devrait lancer son marché de concession en janvier 2024 au plus tard, en janvier prochain. Ce délai suscite des interrogations, compte tenu de l’urgence de la situation, tandis que l’objectif de 1 000 points équivalents, et non de 1 000 points de rechargement, pourrait être atteint par le déploiement de seulement 32 super chargeurs de 350 kilowatts. La lenteur des décisions contrarie un certain nombre d’opérateurs qui s’étonnent de cette absence d’impulsion. Quelles mesures se trouvent actuellement sur la table visant à encourager la SOFICO à jouer un rôle plus actif dans la mise en place de bornes de recharge rapide sur son réseau structurant ? Comment travaillez-vous à permettre un meilleur développement de ces points de charge dans le cadre des renouvellements de concession pour les aires de type 1 et 2 ? Qu’en est-il pour les aires non concédées, toutes catégories confondues ? Pourquoi d’ailleurs se limiter aux seules aires de types 1 et 2 ? Que reste-t-il par ailleurs du projet IBE, qui prévoyait une stratégie en ce sens ? La SOFICO a travaillé à la conception de sa propre cartographie. Pourquoi priorisez-vous donc la concession des bornes lentes et semi-rapides ? Enfin, ce dossier dépendant du Plan national pour la reprise et la résilience, quelles garanties donnez-vous concernant sa mise en service d’ici à 2026 ?
M. Henry, Ministre du Climat, de l’Énergie, de la Mobilité et des Infrastructures. – Les bornes de rechargement sont un secteur en évolution rapide, et sous l’impulsion première du secteur privé. En Flandre, plus de deux tiers des bornes sont à son initiative, et ce même mouvement est à l’œuvre en Région wallonne. Par exemple, selon EV Belgium, si en mars 2022, la Région wallonne comptait 1 800 bornes accessibles au public, aujourd’hui, il y en a 5 000, pour un total estimé de 30 000 véhicules électriques circulant quotidiennement en Wallonie. Tous ces chiffres sont des estimations basées sur les meilleures informations disponibles du secteur lui-même. Je précise que sur les 5 000 bornes présentes, il est estimé que 4 500 sont des bornes lentes et 500 des bornes rapides, c’est-à-dire de plus de 150 kilowattheures, dont 250 superchargeurs. Y a-t-il assez de bornes ? Le secteur de l’électromobilité estime le nombre nécessaire de bornes à mettre à la disposition du public selon les deux normes suivantes. Une borne lente ou semi-rapide pour 10 véhicules, et une borne rapide pour 100 véhicules. Toujours selon EV Belgium, actuellement, cette densité de bornes est respectée en Wallonie, ce qui permet de raisonnablement rencontrer les besoins ; mais seulement les besoins actuels, et sans tenir compte du trafic de transit. Comme le nombre de voitures électriques augmente rapidement, il y a lieu d’étendre le parc de bornes en conséquence pour les prochaines années. Ce projet est complexe, car il nécessite une excellente coordination entre le secteur, les GRD et la Wallonie. Mon cabinet est donc en contact étroit avec ce secteur, sa fédération, EV Belgium, et les GRD. Afin d’aller plus loin dans l’efficacité des échanges, une cellule de coordination pour la transition énergétique des réseaux d’électricité a été créée et validée par le Gouvernement le 21 juillet 2023 et concrétisée récemment, comme nous l’avons déjà évoqué tout à l’heure. Le Gouvernement a donné pour mission à la cellule d’harmoniser la vision des différents acteurs, développer un langage commun et améliorer la compréhension mutuelle en comprenant mieux les intérêts légitimes de chacun, de coordonner et faciliter l’élaboration et la prise de décision du Gouvernement, ainsi que la mise en œuvre et le suivi des objectifs et actions indispensables pour répondre aux enjeux de la transition énergétique des réseaux électriques. Cette nouvelle cellule va permettre de répondre à vos interrogations, assurer un déploiement coordonné des infrastructures de recharge et donc favoriser l’émergence de la voiture électrique chez les particuliers. Afin d’atteindre l’objectif AFIR pour les véhicules légers sur le réseau RTE cœur, c’est-à-dire les autoroutes principales, un site de minimum 400 kilowattheures tous les 60 kilomètres en 2026, les aires autoroutières de type 1 et 2 suffisent. La SOFICO s’appuie sur les concessionnaires actuels, offre actuelle de 8 000 kilowattheures, en progression, et sur les nouveaux concessionnaires, c’est-à-dire le renouvellement de concessions ou des nouvelles concessions pour atteindre l’objectif. Pour les poids lourds, l’objectif est beaucoup plus complexe et il faudrait minimum une aire pour les poids lourds en 2026. Une mise en concurrence prochaine d’une aire testera les règles AFIR long terme, c’est-à-dire, un site avec une puissance minimale de 3 600 kilowattheures pour recharger les camions. Compte tenu du contexte concurrentiel de ce marché, le site ne peut être communiqué à ce stade, dans le respect du principe d’égalité des potentiels soumissionnaires. Pour respecter l’objectif AFIR sur le réseau RTE global, c’est-à-dire les autoroutes et nationales à un chiffre, il est nécessaire de développer de nouvelles concessions sur la nationale 5. Cependant, pour cet objectif AFIR, nous avons plus de marge de manœuvre vu que l’entrée en vigueur est pour le 1er janvier 2028 – 50 % de sites de minimum 300 kilowatts tous les 60 kilomètres. D’un point de vue technique, le règlement AFIR prévoit également un paiement par carte bancaire pour toutes les bornes rapides. Une facilité de paiement est donc prévue pour ce type de borne. Concernant votre question sur les conséquences économiques pour les Wallons et l’application de ces mesures européennes, il n’y a pas d’impact budgétaire pour la Région wallonne. Le modèle concessif utilisé fait supporter les investissements sur le concessionnaire, avec des revenus à la SOFICO, ce qui ne porte pas de surcoût au niveau de la Région ni de l’utilisateur final. La facturation à la minute lorsque la voiture est entièrement chargée est une pratique autorisée afin d’éviter un phénomène de voitures dites ventouses. Généralement, elle n’est pas appliquée pour les bornes rapides, sauf lors du dépassement d’un certain seuil de temps. Sur les aires autoroutières, c’est la logique du stop-and-go qui prévaut, avec l’espoir d’un certain civisme des autres usagers, même s’il arrive que des véhicules non électriques soient parqués sur des places pour voitures électriques, ce qui devra continuer d’être suivi. Concernant l’avancement du déploiement des bornes semi-rapides sur le domaine communal, nous avons reçu le cahier des charges préparé par les ADT. Ce document a été transmis à mon administration pour validation. Il pourra ensuite être présenté au Gouvernement. Au sujet de la base décrétale pour restreindre les citoyens qui ne possèdent pas de parking privatif, je ne partage pas tout à fait votre point de vue, Madame Goffinet. Concrètement, pourquoi faudrait-il mettre une contrainte à la recharge à domicile ? Aujourd’hui, la règle est relativement claire : le citoyen ne peut pas faire passer de câble électrique sur ou au-dessus de la voie publique sans autorisation de la commune. Si la commune accepte que le citoyen fasse passer son câble via une dalle rainurée ou via un bras articulé, pourquoi la Wallonie devrait-elle l’interdire ? Concernant votre question technique sur la cabine haute tension, je ne suis pas sûr de la comprendre. Il faut d’abord noter que votre interrogation porte juste sur les bornes rapides, vu que pour les bornes lentes et semi-rapides, il n’est pas nécessaire d’avoir une cabine haute tension. Lorsque l’on souhaite installer une borne rapide, vu la puissance nécessaire, il faut presque toujours installer une cabine haute tension en plus du raccordement électrique. Il faudra donc bien choisir son emplacement pour que la distance entre la cabine et les bornes ne soient pas trop importante.
Réplique de N. Janssen. – Concernant la coordination entre l’ensemble des acteurs – on l’a évoquée à quelques reprises ces dernières semaines –, c’est prioritaire et j’espère qu’elle permettra d’être suffisamment réactif et d’atteindre les objectifs fixés, notamment en termes de timing. Je pense que vous n’avez pas répondu à la question, mais je pourrai revenir sur le sujet. Quant au fait que le dossier dépend du Plan de relance et de résilience, quelles sont les garanties ? À quel point sommes-nous confiants que nous parviendrons à une mise en service d’ici à 2026 ? On sait que les délais sont courts. Concernant une borne rapide pour 100 véhicules, on y est, mais comme vous le disiez, sans tenir compte de l’évolution future et sans tenir compte du trafic de transit, qui sont deux éléments déterminants ? Par conséquent, je reste préoccupé.