QO 27/06/23 à la Ministre Tellier : La transparence des procédures de vente des propriétés forestières publiques wallonnes
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Question (Nicolas Janssen). – Madame la Ministre, mes collègues ont déjà bien établi le contexte de la question. En décembre 2022, la Région a acheté, dans le cadre de la création du parc national de l’Entre-Sambre-et-Meuse, le domaine Risque Tout, dit du bois d’Arlon, d’une contenance de 355 hectares de forêt à Viroinval, détenu par la Ville d’Arlon pour un montant de 4,6 millions d’euros. À la suite de cette vente basée sur la seule expertise des services du cantonnement du DNF, certains ont dénoncé un prix de vente inférieur à la valeur réelle du bien et réclamé une seconde expertise. Le montant de la contre-estimation, commandée auprès d’un expert forestier privé, est désormais connu et s’élève à 8,618 millions d’euros, ce qui représente 4 millions de plus que le prix de vente fixé par et pour la Région wallonne. Nous sommes tous conscients qu’estimer une forêt publique n’est évidemment pas une chose aisée. Cette différence, on ne peut le nier, est conséquente et pose question. Je citerai, à titre de comparaison, un autre bien forestier, qui s’est vendu récemment à Couvin, sur Biddit, pour 3, 5 millions d’euros pour une superficie de 115 hectares. Dans ce cas, on est donc aux environs de 30 000 euros l’hectare. Dans le cas du bois d’Arlon à Viroinval, on avoisine les 11 000 euros par hectare, selon l’estimation qui a mené à la vente, alors que, dans la contre-estimation, le prix dépasse les 24 000 euros l’hectare. Derrière ces chiffres se pose la question de la procédure d’évaluation du bien, d’un potentiel conflit d’intérêts du DNF, qui se voit confier l’estimation. Pourriez-vous clarifier la situation concernant la vente du domaine Risque Tout de la Ville d’Arlon à la Région wallonne ? On ne peut manquer de s’interroger sur ce processus. Comment la Région peut-elle être à la fois juge et partie, estimatrice et acquéreuse ? Une révision des procédures de vente des propriétés forestières publiques n’est-elle pas, dès lors, à l’ordre du jour ? De procédures claires et précises, évitant tout risque de conflit d’intérêts, apporteraient indéniablement un climat plus serein.
Mme Tellier, Ministre de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal. – Madame et Messieurs les Députés, vous vous en doutez, je suis particulièrement attentive au dossier de la vente du domaine du Risque-Tout, situé dans la commune de Viroinval. À ce stade, il semble important de rassembler toutes les informations nécessaires à l’analyse sereine de ce dossier. Les deux estimations me sont bien parvenues, l’une réalisée par l’expert forestier, M. Reginster, et l’autre par l’analyse conjointe du comité d’acquisition et du Département de la nature et des forêts. Je rappelle que la vente vise la création d’une réserve naturelle domaniale et n’a pas de lien, Monsieur Courard, avec le parc national. Il est évident que l’objectif en ce qui concerne le rachat est bien d’acheter le bien au prix le plus juste pour l’ensemble des parties. Dès lors, afin d’apporter toute la clarté sur ce dossier, j’ai demandé à mon administration de réagir dans les plus brefs délais. D’une part, mes services rédigeront un rapport conjoint avec le comité d’acquisition. Ce document concernera l’évaluation du volume et de la valeur du fonds et des bois, en faisant état des hypothèses qui sous-tendent l’estimation menée par leurs services, mais aussi en croisant avec les hypothèses de l’expert mandaté par la commune elle-même. D’autre part, mon administration réexaminera avec un regard neuf, conjointement avec le comité d’acquisition et sur la base de l’évolution du contexte et de nouvelles données de vente, la valeur du fonds et la valeur des bois. L’objectif est de clarifier les éventuelles options possibles, notamment en termes de valeur des bois et d’intégration du risque sanitaire et climatique. Cette nouvelle estimation et cette nouvelle analyse devraient permettre d’objectiver les deux estimations en vue d’une réunion qui sera organisée prochainement avec la Ville d’Arlon. Une fois cette situation éclaircie, mais pas avant, vous le comprendrez, il conviendra de tirer les conclusions et de prendre les mesures adéquates. Soyez assurés, évidemment, Madame et Messieurs les Députés, que je continuerai à suivre ce dossier avec toute l’attention nécessaire. Je nous invite néanmoins collectivement, à la mesure des propos que nous engageons, à éviter des procès d’intention à l’égard des différentes personnes concernées.
Réplique de N. Janssen. – Merci, Madame la Ministre, pour vos précisions. Il s’agit en effet de permettre, pour reprendre vos termes, d’acheter ce bien au prix le plus juste. Mon groupe sera attentif au rapport conjoint qui sera produit par vos services afin d’objectiver la question et d’augmenter la transparence. Le cas échéant, peut-être sera-t-il en effet nécessaire d’adapter les procédures de vente de biens publics.